Source fiche technique : Wikipedia
Pendant la guerre froide, entre la Pologne stalinienne et le Paris bohème des années 1950, un musicien épris de liberté et une jeune chanteuse passionnée vivent un amour impossible dans une époque impossible.
Prix de la mise en scène Cannes 2018.
La musique et la danse sont le fil rouge de ce film en noir et blanc. Pawel Pawlikowski (La femme du cinquième, Summer of love, Ida) fait le choix éthique de filmer dans la vérité des paysages décolorés de l’après-guerre une histoire d’amour impossible. Le rouge, couleur du communisme, n’existe qu’en gris sous la forme de portraits géants de Lénine et Staline. Il est un fond invisible qui met en valeur Wiktor (Tomasz Kot) et Zula (Joanna Kulig), leur amour passionnel pris dans les rets de la Guerre froide. Engagée en 1949 dans une troupe folklorique, gage de la renaissance d’une Pologne meurtrie, Zula au passé sulfureux tombe amoureuse du musicien et pianiste Wiktor. Le couple traverse vingt ans de fuite et de retrouvailles, chaque rencontre se déroulant dans une ville différente, à l’Est ou à l’Ouest, au grès des tournées de la troupe. Wiktor s’est exilé tandis que Zula, figure ambigüe de femme fatale, toute en blondeur et moue capricieuse, a choisi de rester en Pologne. Est-ce ce péché originel (il est parti sans elle) qui la rend cruelle ? Aucune réussite artistique ne met de baume sur le sentiment de trahison qu’elle éprouve. L’air populaire chanté par la petite fille au début du film passe d’époque en époque, de ville en ville, de Berlin à Paris, interprétée par Zula selon le tempo à la mode, tout en gardant la trace mélancolique de son origine. Jeanne Balibar, Cédric Khan creusent à travers leurs personnages si parisiens le fossé des cultures exilées.
La psychologie n’est jamais démonstrative. Il y a un retrait, un décalage déceptif dans la mise en scène de Pawlikowski. Plus que la litote dont Pierre Murat se fait l’écho dans l’excellent bonus, le hors champ et l’ellipse resserrent l’enjeu des retrouvailles dans un présent qui échoue à se vivre. L’église en ruine au toit ouvert sur le ciel est à l’image de leur amour, impossible à construire.
Annie Demeyere